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Vaches rwandaises
28 décembre 2007

IV. Les vaches et la politique L'agriculture

IV. Les vaches et la politique

            L'agriculture occupant une place prépondérante dans l'économie rwandaise, l'Etat rwandais accorde une grande importance à l'élevage bovin et à la production laitière, dont il a fixé les objectifs pour les années à venir.


            
1. Le manque de terres 

Les pâturages et les hommes

            L'élevage bovin rwandais est majoritairement extensif ; il doit donc, pour être rentable, disposer de grands espaces. Pour chaque région du Rwanda l'ISAR a calculé la capacité de charge, c'est-à-dire le nombre de têtes de bétail que peut supporter un pâturage sans se détériorer, le bétail devant rester en bon état d’entretien, voire prendre du poids ou produire du lait pendant son séjour sur le pâturage. Dans l'Umutara, la capacité de charge varie entre 0,5 et 2 vaches par hectare et par an.

            Depuis longtemps le Rwanda connaît des problèmes de population. La densité de sa population, 315,4 habitants par km2, est la plus élevée du continent africain et le manque de parcelles fut l'un des éléments de conflit qui précipitèrent le génocide. Dans Une saison de machettes, un génocidaire explique : "Ce sont les vaches et les parcelles qui devançaient ces jalousies d’allure. Surtout les vaches, parce que les Tutsis avaient l’habitude de les attrouper de façon qu’on ne puisse plus dénombrer celles des uns et des autres."

            La population s'est encore accrue depuis 1994 avec le retour au Rwanda de centaines de milliers de personnes dont les familles étaient réfugiées à l'étranger, parfois depuis ces décennies. Les défrichements entrepris pour donner des terres à ceux qui n'en avaient pas ont aggravé les problèmes de fourniture en bois : l'immense majorité de la consommation d'énergie rwandaise est assurée par le charbon de bois et seuls 7% du territoire sont encore boisés. Les Rwandais envient le voisin congolais qui possède des centaines de km2 de prairies et de forêts.


La nécessaire modernisation de l'élevage

            L'augmentation de la population et la redistribution des terres qui l'accompagne ne permettent plus aux éleveurs de posséder autant de vaches qu'autrefois. Malgré cela, le nombre de vaches continue de croître : bien que 80% du cheptel ait été exterminé pendant le génocide, l'afflux massif de bovins venus de l'extérieur avec les réfugiés a contribué à rétablir la situation. En 1994, on comptait au Rwanda un peu moins de 600 000 têtes ; aujourd'hui, ce chiffre a doublé.

            Le gouvernement tente de convaincre les éleveurs de se diriger vers l'élevage intensif, de privilégier et de subventionner l'élevage en stabulation ou en semi-stabulation. La semi-stabulation, qui permet aux bovins de paître deux ou trois heures par jour à l'extérieur, présente l'avantage de conserver leur utilité aux pâturages traditionnels tout en augmentant leur capacité de charge. Elle a été développée avec succès dans la région de Kigali et à l'est du Rwanda mais le climat et la taille des exploitations rendent leur implantation plus difficile dans l'Umutara, la région de Kibungo et le Bugesera.

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Une vache « exotique » dans une ferme sur le Nyabarongo



            
2. Les produits de l'élevage bovin

Le lait

            L'élevage intensif est surtout rendu nécessaire par les besoins en lait de la population rwandaise. La production laitière entre janvier et juin 2004 était de 67 088 tonnes alors qu'on évalue la demande à 400 000 tonnes. Selon le Minagri, l'augmentation de la production et la gestion de son acheminement vers les villes par des coopératives, permettraient d'en réduire considérablement le prix. Aujourd'hui, un litre de lait coûte 100 Frw (0,15 €) dans l'Umutara et 250 Frw (0,37 €) à Kigali.

            Le lait est encore trop cher pour les Rwandais mais aux dires des nutritionnistes c'est un aliment protéiné et sa production à moindre coût est facilement envisageable. C'est pour cette raison que l'objectif avoué du gouvernement est de diriger l'élevage bovin vers la production de lait et non vers la production de viande.

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La traite du soir dans la ferme de l’ISAR à Songa



Les produits secondaires

Les autres produits de l'élevage bovin n'ont qu'une importance mineure. Le travail du cuir de vache se pratiquait autrefois pour la confection de vêtements mais il ne semble pas qu'il soit très développé aujourd'hui.

Certains affirment que l'utilisation de l'urine de vaches comme antiseptique n'est plus pratiquée aujourd'hui. Selon les vachers de Gishwati, cela fait une quinzaine d'année que ces pratiques ont disparu.

La bouse de vache est utilisée pour recouvrir l'intérieur des maisons, surtout dans l’Umutara et Gishwati. Elle est aussi utilisée pour la fertilisation des champs chez les fermiers. Toujours selon les vachers de Gishwati, elle n'est pas recueillie directement au pâturage : si l'on en a besoin, on fait venir une vache près de la maison.


            
3. Le programme d’amélioration génétique bovine

Les ankole et les exotiques

            L'objectif principal de l'élevage bovin rwandais en 2004 est l'augmentation de la production de lait. Or les ankole de l'Umutara donnent approximativement 3 litres de lait par jour pendant la saison sèche et 5 litres par jour pendant la saison des pluies, tandis que les vaches européennes (frisonne, jersey) fournissent à leur propriétaire entre 25 et 30 litres de lait par jour.

            Cependant les vaches exotiques supportent mal les conditions naturelles du Rwanda, même en semi-stabulation. Leur résistance aux variations climatiques saisonnières et leur capacité d'adaptation lors d'un changement de milieu sont moindres et elles sont plus vulnérables aux tiques et aux maladies contagieuses.

            La solution qui a été trouvée par l'ISAR il y a vingt ans est de donner naissance à une race nouvelle qui conjuguerait la résistance des ankole et les capacités de production des vaches exotiques.


L'amélioration génétique

            M. Nubuhoro Nkundakozera, chef du Centre d'Amélioration Génétique de l'ISAR Songa, décrit les trois étapes de l'amélioration génétique par croisements successifs :

            1. Une vache ankole croisée avec un taureau jersey donne naissance à une première génération-fille : F1.

            ankole + jersey > F1 (50% ankole + 50% jersey)

            2. La vache de génération F1 est croisée avec un taureau sahiwal pour donner naissance à une deuxième génération-fille : F2.

        F1 + sahiwal> F2 (25% ankole + 25% jersey + 50% sahiwal) 

            3. La  vache de génération F2 est croisée avec un taureau jersey pour donner naissance à la troisième génération fille : F3.

            F2 + jersey > F3 (12,5% ankole + 25% sahiwal + 62,5% jersey)

            La vache de génération F3 réunit l'abondance de la production laitière des jersey et des sahiwal et la résistance des ankole. Ce programme a déjà été mené avec succès dans les années 1990. L'ISAR était parvenu à donner naissance à des vaches de génération F3 mais elles ont été tuées parmi d'autres pendant le génocide et il a fallu tout recommencer.

157_Marchand_de_fromages___Gisenyi

Pancarte peinte à Gisenyi

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